
Avec Mystic, premier extrait de leur futur album Volume V, Other Lives signe un retour élégant et puissamment orchestré. Le groupe américain, né à Stillwater dans l’Oklahoma, mêle depuis ses débuts folk, rock alternatif et ambiances cinématographiques. Formé autour de Jesse Tabish, Jonathon Mooney et Josh Onstott, le trio s’est toujours distingué par une écriture riche et immersive. Leur nouvelle chanson renoue avec la tension dramatique et l’intensité sonore qui ont fait leur réputation dans l’indie américain. Mystic annonce un album ambitieux, enraciné dans leurs terres natales mais tourné vers de nouvelles envolées orchestrales.
Mystic : la démesure maîtrisée d’un retour attendu
Dès ses premières mesures, Mystic impose une montée en tension à la fois solennelle et expansive. La chanson s’ouvre sur des nappes de cordes, ponctuées d’un motif répétitif au piano, avant que la voix fragile et magnétique de Jesse Tabish ne vienne poser un voile mélancolique sur cet écrin orchestral. On retrouve ici tout ce qui fait l’essence du groupe : un sens de la dramaturgie sonore, un goût pour les textures et une narration musicale immersive.
Mais là où For Their Love (2020) optait pour une forme de dépouillement émotionnel, Mystic semble renouer avec la densité de leurs débuts tout en poussant plus loin encore l’amplitude. Les arrangements se densifient à mesure que le morceau progresse, jusqu’à atteindre une forme d’apothéose maîtrisée. Un signal fort pour annoncer l’arrivée de Volume V.
Volume V : un sanctuaire sonore enraciné à Stillwater
Si la musique d’Other Lives a toujours eu quelque chose d’intemporel, leur cinquième album (déjà en précommande) s’inscrit aussi dans un territoire physique bien réel : la ville de Stillwater, Oklahoma. L’essentiel de Volume V a été enregistré dans une ancienne église désormais transformée en musée, The Sheerar. Une acoustique naturelle, une aura de recueillement, une mémoire collective : le lieu s’impose comme un véritable sanctuaire sonore pour un groupe en quête de réconciliation avec ses racines.
Selon Jonathon Mooney, ce retour dans leur ville natale a agi comme une forme de refuge artistique. L’album, qui comprendra huit chansons et deux instrumentaux, semble vouloir concilier grandeur orchestrale et intimité émotionnelle. Le choix du lieu n’est donc pas anodin : il incarne l’idée d’un ancrage profond, d’un retour au foyer qui ne signifie pas repli, mais élévation.
Other Lives : les racines et les voyages
Pour mieux saisir la portée de ce nouvel opus, il faut revenir sur le parcours singulier d’Other Lives. Originaires de Stillwater, un bourg rural situé entre les lacs McMurtry et Carl Blackwell, les membres fondateurs du groupe se font d’abord remarquer avec un premier album éponyme, avant de connaître un tournant majeur avec Tamer Animals (2011). L’album séduit par ses ambiances pastorales et son lyrisme feutré, au point que le magazine MOJO n’hésite pas à parler d’“American pastoral sensation”.
La suite se joue plus à l’ouest : direction Portland, Oregon, où le groupe s’installe pour enregistrer Rituals (2015), puis For Their Love. Ces années marquent aussi l’arrivée progressive de Kim Tabish, compagne de Jesse, au sein du projet. Son apport – à la fois vocal, instrumental et narratif – va enrichir la palette du groupe d’une sensibilité nouvelle.
Une alchimie intime et géographique
La pandémie, comme pour beaucoup d’artistes, bouleverse les équilibres. Isolés du reste du groupe, Jesse et Kim Tabish poursuivent leur chemin créatif à deux. De cette période naît Cowboy Ballads Part 1, un album solo de Jesse, marqué par la solitude et le dépouillement. Le disque, sorti en 2022, amorce aussi un nouveau cycle : le couple quitte l’Oregon pour revenir à Stillwater, avant de s’installer à Cleveland. Pendant ce temps, Mooney vit à New York et Onstott à Los Angeles.
Cette dispersion géographique pourrait paraître un frein. Elle est en réalité un nouveau moteur. Car Volume V parvient à concilier les distances, à réaffirmer une unité profonde malgré l’éclatement physique. L’enregistrement en Oklahoma agit comme un point d’ancrage commun, un rappel de ce qui unit les membres au-delà des kilomètres.
Mystic : un prélude à l’automne orchestral d’Other Lives
Mystic est plus qu’un simple single : c’est une déclaration d’intention. Son souffle large, ses arrangements superposés, sa tension dramatique maîtrisée dessinent déjà les contours de Volume V. Loin d’un retour nostalgique ou d’une redite des formules passées, le morceau annonce un projet mûri, à la fois introspectif et ouvert, raffiné mais vivant.
Le groupe semble avoir trouvé un nouvel équilibre entre sa vocation artisanale et sa volonté d’élévation. Les fans de la première heure y reconnaîtront les paysages sonores qui les ont séduits ; les nouveaux venus y découvriront une œuvre sincère, dense, et irrésistiblement atmosphérique.
Ce qu’on attend de Volume V
À deux mois de sa sortie, Volume V s’annonce comme l’un des disques les plus aboutis du groupe. Si Mystic en donne le ton, on peut s’attendre à un album homogène, d’une cohérence narrative et sonore exemplaire. La présence de deux instrumentaux laisse aussi présager des respirations poétiques entre les grandes envolées vocales.
Surtout, ce disque pourrait bien marquer un point d’orgue dans la discographie d’Other Lives : celui d’un retour au cœur, au territoire, mais avec le regard et les sons élargis par les années de voyages. Un chapitre qui s’écrit en pleine maturité.